Monsieur le Ministre,

Je vous avais interrogé début de l’année 2015 suite à la réforme du mode de calcul des cotisations sociales des indépendants, réforme initiée par votre prédécesseur, Madame Laruelle, et entrée en vigueur depuis le 1er janvier. Pour rappel, alors qu’auparavant les indépendants payaient leurs cotisations sociales en fonction de leurs revenus d’il y a trois ans (système n sur n-3), la réforme a instauré un mode de calcul où les cotisations sociales vont correspondre au revenus de l’année même (système n sur n). J’avais évidemment salué à l’époque cette réforme permettant à beaucoup d’indépendants de ne pas se retrouver dans des situations surréalistes où ils ne peuvent plus payer ces cotisations car leurs revenus ont changé.

Il restait cependant une inconnue, c’était l’organisation de la transition entre l’ancien et le nouveau système de calcul des cotisations sociales. A cet égard, vous m’aviez expliqué cette transition en précisant que la loi prévoit des évaluations continues et une évaluation plus complète avant la fin de cette année. C’est justement pour cela que je reviens vers vous aujourd’hui en commission.

En effet, Monsieur le Ministre,

§  Pouvez-vous me faire un bilan de cette transition entre ancien et nouveau système de calcul des cotisations sociales?

 

§  Déplorez-vous des situations anormales ou pénalisantes par rapport à la mise en place de cette réforme?

 

Réponse de Willy Borsus à la question écrite n° 218 de Caroline Cassart-Mailleux:


1. Comme vous l'indiquez, la transition de l'ancien mode calcul des cotisations sociales vers le nouveau à partir du 1er janvier 2015 n'est pas un exercice facile. Elle a demandé d'une part la mise en oeuvre de nouvelles procédures et l'adaptation des outils informatiques par l'administration et par les caisses d'assurances sociales. C'est ce qui explique la période de plus d'un an entre l'adoption de la loi fin 2013 et la date d'entrée en vigueur effective. Cette transition nécessite d'autre part une vigilance importante de tous les acteurs et de ma part, par rapport à tout problème que le nouveau calcul poserait aux travailleurs indépendants. Cela s'est concrétisé , depuis le début de cette année, par une série d'actions d'évaluation et de monitoring. La loi du 22 novembre 2013 portant réforme du calcul des cotisations sociales prévoit en son article 16 qu'une évaluation de la réforme soit réalisée par le Comité général de gestion pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, ce d'ici fin 2018 ("dans les quatre ans après son entrée en vigueur"). Les travaux liés à cette évaluation devraient débuter dans le courant 2017. Entre-temps, j'ai pris l'initiative de réunir un "comité de monitoring de la réforme" rassemblant l'ensemble des parties prenantes à la réforme : organisations représentatives des indépendants, caisses d'assurances sociales, l'INASTI, la DG Indépendants ainsi que les instituts des comptables et réviseurs d'entreprises. Ce comité est présidé par mon cabinet. Ce Comité s'est réuni à 4 reprises ces 23 avril, 11 juin, 10 septembre et 16 novembre. Outre cela, l'application sur le terrain est suivie de près dans le cadre d'un groupe de travail technique, composé des caisses d'assurances sociales pour travailleurs indépendants, l'INASTI et la DG Indépendants du SPF Sécurité sociale.

2. Les premières évaluations opérées par le comité de monitoring sont positives : quelques 30.000 indépendants ont déjà bénéficié des nouvelles possibilités d'adaptation de leurs versements provisoires, et ce sans problèmes administratifs et sans retard de traitement. En outre, le taux d'encaissement et les montants de cotisations encaissées après neuf mois sont meilleurs en 2015 qu'en 2014. Cette situation devra être confirmée au regard des résultats complets de l'année 2015. Ces chiffres seront disponibles vers le 20 janvier 2016. En termes de situations anormales ou pénalisantes, le comité n'en a pas relevé mais a mis en évidence deux principales sources d'incompréhensions de la part d'indépendants concernés. Tout d'abord, il s'agit de la problématique des travailleurs indépendants dont les revenus en 2012, 2013 et/ou 2014 étaient exceptionnellement bas. Suite à la réforme, ces années entrent encore en ligne de compte pour le calcul des cotisations provisoires mais plus pour le calcul des cotisations sociales définitives de 2015, 2016 et/ou 2017. Ces travailleurs indépendants ont - dans certains cas de chute importante et temporaire de leurs revenus - le droit de se dire lésés par la réforme étant donné que dans l'ancien régime pour l'année 2015, 2016 et/ou 2017, ils pouvaient s'attendre à des cotisations sociales basses. Afin de chercher une solution à cette problématique, j'ai composé un groupe de travail technique au sein du Comité de monitoring en vue de développer des dispositifs correctifs. Mon cabinet examine actuellement la faisabilité administrative et budgétaire des dispositifs ainsi que leur intérêt en termes de réel impact positif pour l'ensemble des travailleurs indépendants impactés. Le deuxième point auquel je veux prêter attention concerne l'application des règles en matière de réduction des cotisations provisoires. La législation prévoit actuellement que, sur base d'éléments objectifs, l'indépendant puisse obtenir une réduction de ses paiements provisoires de cotisations sociales. Et la loi fixe une série de seuils, planchers de revenus sous lesquels les revenus de l'indépendant doivent être passés, et sur la base desquels la caisse d'assurances sociales calcule le montant des cotisations provisoires réduites. Ce système par seuils présente une certaine rigidité. Il pose aussi la question de la garantie d'un même traitement des éléments objectifs sur l'ensemble du territoire au travers des différentes caisses d'assurances sociales. Ces deux aspects, traitement identique et assouplissement des seuils, feront en 2016 l'objet de développements et d'analyses de la part du comité de monitoring. Globalement, à ce stade, le comité de monitoring conclut que, malgré des niveaux records en termes de demandes d'informations et d'explications et outre les réactions par rapport aux deux problématiques développées ci-dessus, la situation est actuellement entièrement maîtrisée.