Madame la Ministre,
Sept projets-pilotes ont débuté début 2016 dans
des hôpitaux belges en vue d’implémenter progressivement le raccourcissement
des séjours hospitaliers pour accouchement. L’objectif de cette réforme est de
diminuer les coûts pour la sécurité sociale dans le cadre de la réforme du
financement hospitalier. Pour participer au projet, les futures mères devaient
être volontaires et la collaboration des sages-femmes, médecins généralistes et
infirmières était indispensable. La durée de ces projets est de deux ans avec
une évaluation chaque année. Il est donc temps de faire le bilan après cette
première année.
Madame la Ministre,
§ Avez-vous reçu le rapport de suivi intermédiaire (après un an de
fonctionnement)? Quelles sont les grandes lignes de ce dernier? Que convient-il
d’en retenir?
§ Quelles sont les principales difficultés rencontrées par la mise en
œuvre de ce projet?
§ Des modifications et/ou améliorations peuvent-elles se greffer sur le
projet en cours? Si oui, lesquelles?
§ Pouvez-vous me dire si le projet rencontre le succès attendu? Les
retours du terrain sont-ils positifs?
Benoît Piedboeuf (MR):
Monsieur le président, madame la ministre, votre volonté est d'améliorer la
qualité des soins et de tabler sur
l'effet "volume" pour certaines spécialités. Reste que, dans les
zones moins densifiées, un service de soins de santé doit être assuré. C'est la
base du projetVivalia2025 en province de Luxembourg.
Madame la ministre, afin de
bien profiler le modèle, pouvez-vous nous donner succinctement votre vision du
socle de base minimum à assurer sur place ? Un hôpital de haut niveau, sauf
spécialités réservées à un ou deux sites en Belgique, est-il compatible avec votre
vision de l'évolution du paysage hospitalier ? Si oui, dans quelle mesure ?
Réponse de Maggie De Block à la question n° 16073 de Caroline
Cassart-Mailleux:
Quand il y a tant de questions sur un sujet, cela veut dire qu' il y a
des choses à préciser. Comme vous le
savez, la réforme des hôpitaux est l'un des chantiers principaux au sujet
duquel nous communiquerons bientôt. Tout changement cause une certaine
réticence. Cela vaut également pour le monde des hôpitaux.
Cependant, j'ai choisi de mener une politique qui me permet de garder
les soins de santé belges à un haut niveau, voire même d'en améliorer la
qualité et qui, en plus, permet de préparer nos soins de santé ainsi que le paysage
hospitalier aux évolutions démographiques et médico-technologiques.
Cette importante réforme se déroule dans les limites des possibilités
budgétaires actuelles. Nos soins de santé doivent rester abordables à l'avenir,
tant pour les pouvoirs publics que pour les patients.
Beaucoup de choses ont changé au niveau des soins mais aussi dans notre
société et ce, dans de nombreux domaines. Notre vision de la notion de qualité
a été revue suite aux nombreuses études internationales et belges menées entre
autres par le KCE et qui démontrent que la qualité des soins hospitaliers est
en grande partie déterminée par l'expertise médicale. Éventuellement au sein
d'une équipe multidisciplinaire, cette expertise est surtout nécessaire dans
des cas complexes et pour les pathologies moins fréquentes mais elle est aussi
vitale, au sens littéral, pour être capable d'intervenir de manière adéquate en
cas de complication lors d'une intervention en cas de pathologie courante.
Les prestataires de soins ne peuvent acquérir et entretenir cette
expertise qu'en voyant suffisamment de patients.
L'accessibilité des soins va bien au-delà de la distance vers un
hôpital. Certains sont préoccupés par le fait qu'à l'avenir, les patients
devront peut-être se déplacer un peu plus loin pour bénéficier de soins
adéquats. Mais soyons honnêtes, notre large infrastructure routière fait que la
proximité des soins est un concept relatif. Je dis souvent que nous ne sommes
pas au Canada, ici. Les temps de trajet dans les métropoles sont à certains
moments de la journée bien plus problématiques que dans les zones rurales. De
plus, la proximité des soins n'est pas toujours synonyme de qualité de soins.
Les pays scandinaves, par exemple, ont un système de soins de santé très performant, accessible à tous les
habitants, y compris à ceux provenant
des zones à faible densité de population, mais sans pour autant déployer tous
les soins médicaux et tous les soins hospitaliers dans chacune des régions
isolées. Lorsque j'ai visité le Danemark, j'ai constaté qu'avant leur réforme
qui leur a pris vingt ans, ils avaient aussi de petits hôpitaux sur leurs
petites îles. À présent, leurs soins se sont améliorés et sont de meilleure
qualité. Leur infrastructure comprend
par exemple des hélicoptères, vu la particularité de leur territoire.
Nous nous organisons afin que le patient puisse être vu par un médecin
partout et à tout moment et, si nécessaire, bénéficier des premiers soins pour
ensuite, le cas échéant, poursuivre son traitement ailleurs, notamment là où
l'expertise, la technologie et les appareils
requis sont disponibles.
Cette organisation doit prévoir une disponibilité des médecins et des
services mobiles d'urgence et de réanimation (SMUR), sept jours sur sept, 24 heures
sur 24, et pas nécessairement dans un service d'urgence spécialisé au sein de
l'hôpital. Il existe également des règles concernant les SMUR et la législation
garantit une couverture suffisante du territoire.
L'affectation des moyens publics limités doit être beaucoup plus
efficace. Nous n'y arriverons pas en organisant de nombreuses permanences
24heures sur 24, sept jours sur sept, par exemple pour les maternités qui ont
moins d'un accouchement par 24 heures et les services qui ont une activité trop
faible. Cela implique une utilisation inefficace du personnel et des moyens,
mais aussi le fait qu'il y a de fortes chances que, les prestataires de soins
n'ayant pas suffisamment d'opportunités d'acquérir l'expertise ou de la
préserver, la qualité soit insuffisante.
Cela ne vaut pas que pour les salles d'accouchement. L'efficacité et la
qualité des soins vont aussi de pair dans les unités de soins infirmiers. Je prends
encore l'exemple des maternités. En Belgique, les maternités ont un taux
d'occupation de moins de 50%. Une réduction du nombre de maternités, tout en
augmentant le taux d'occupation des lits, sera bénéfique pour la qualité des
soins pour la mère et son bébé, mais aussi pour la satisfaction des infirmiers
et sages-femmes. Car, même pour un nombre limité de patients dans une petite
maternité, il faut continuer à assurer la permanence, avec une équipe beaucoup
plus restreinte. Il est donc bel et bien utile de concentrer les accouchements
dans un nombre limité de maternités.
Il va de soi que cela entraîne des problèmes liés à la transition et
qu'il convient donc de prévoir des mesures transitoires pour accompagner ce
changement.
Comment allons-nous procéder concrètement pour mettre en place les
réformes des hôpitaux ? Comme je l'ai déjà indiqué en septembre dernier au sein
de cette commission, la cellule stratégique a eu une concertation périodique
avec un représentant des médecins, les coupoles hospitalières - vous savez
qu'il y en a plusieurs en Wallonie - et les mutualités, en plus des entretiens
bilatéraux réguliers avec les différentes parties prenantes.
En outre, nous soumettons nos plans aux entités fédérées au sein de la
commission interministérielle Santé publique et, dans l'esprit de la
déclaration commune de 2015, nous espérons pouvoir arriver à une vision
commune.
Enfin, en ce qui concerne les projets pilotes relatifs aux accouchements
avec séjour hospitalier écourté, nous avons sélectionné sept projets pilotes
l'année dernière afin qu'ils puissent exécuter leur plan. Les partenaires de
ces projets ont commencé leurs travaux l'été dernier et/ou en septembre
dernier. Nous attendons leur première évaluation intermédiaire un an après et
nous ne sommes donc pas encore en mesure de vous fournir un rapport à ce sujet.
Nous y reviendrons.
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