QE - De Block - La tuberculose en Belgique
Publié le 01/01/1970 à 01:00
- Articles
- Questions parlementaires
- La tuberculose en Belgique
Madame la Ministre,
Il ressort de plusieurs rapports que la tuberculose est
en recrudescence en Belgique. En effet, en 2016, et alors que la recherche d’un
vaccin ou d’autres médicaments est « sévèrement sous-financé »,
l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estimait le nombre de personnes
infectées à plus de 10 millions.
Toujours selon l’OMS, 1,8 million de personnes sont
décédées de la tuberculose en 2015, soit 300.000 de plus qu’en 2014. De plus,
deux personnes sur cinq n’ont pu être diagnostiquées à temps et ont donc pu
répandre la maladie par voie aérienne.
Enfin, (et c’est
interpellant!), selon un rapport sur la santé mené en milieu carcéral par une
Députée wallonne, on estime que le risque de contracter la tuberculose est seize
fois supérieur à l’intérieur d’une prison. Généralement, les prisons les plus
touchées sont celles avec une population importante et un turn-over fréquent.
Je souhaite donc
faire le point avec vous sur cette problématique.
Madame la Ministre,
§ Combien de cas de tuberculose recensez-vous en Belgique pour les années
2014, 2015, 2016 et 2017?
§ Combien de cas de tuberculose recensez-vous au sein des prisons?
Comment est-elle soignée en milieu carcéral et comment protéger les autres
détenus pour éviter une épidémie?
§ Quelles sont les dernières avancées pour prévenir et lutter contre la
tuberculose?
Réponse de Maggie De Block à la
question n° 2415 de Caroline Cassart-Mailleux:
1. Le
nombre de cas déclarés avoisine les 1.000 cas au cours des 4 dernières années.
Il s’agit respectivement de:
ü 959 cas en 2014
ü 988 en 2015
ü 1.047 en 2016.
Ces nombres
correspondent à des incidences de 8,6, 8,8 et 9,3/100.000 habitants. Il y a
donc une augmentation non
significative du nombre de cas et de
l’incidence en 2015 et 2016 par rapport à 2014; elle est à mettre en relation avec
l’afflux de réfugiés à partir de la mi-2015. Les résultats de 2017 sont encore
provisoires mais la tendance est à la baisse par rapport à 2016.
2. En 2014, 35 cas de tuberculose ont été
déclarés dans les prisons belges ce qui représente 3,6% du nombre total de cas
déclarés au cours de cette année. Depuis, ce nombre a diminué: 12 cas en 2015
(1,2 %) et 19 cas en 2016 (1,8 %). Les données de 2017 ne sont pas encore
disponibles.
3. L’OMS soutient l’élimination de la TBC
en 2035. Pour arriver à cet objectif ambitieux, elle préconise de renforcer les
stratégies existantes au niveau mondial et d’innover en termes de vaccins,
traitement et diagnostic.
En ce qui
concerne les pays à basse incidence (moins de 10 cas/100.000 habitants),
arriver à éliminer la tuberculose ( moins de 1 cas/million) dans ce délai
semble utopique. Tout au plus ces pays parviendront au stade de préélimination
(moins de 10 cas/million d’habitants) à condition d’adapter leurs stratégies et
faire en sorte que leur incidence annuelle diminue plus vite qu’elle ne le fait
actuellement. Ces adaptations devront viser non seulement la diminution de la
transmission des bacilles tuberculeux mais aussi la limitation du réservoir de
futures maladies en agissant sur les personnes au stade de l’infection latente.
Avec une
incidence de moins de 10/100.000 depuis 2007,
la Belgique est considérée comme un pays à basse incidence. La
décroissance annuelle de l’incidence y est moins importante que prévu (entre
2-3% au cours des 15 dernières années)
et selon les estimations de l’OMS,
il faudrait que cette diminution
atteigne en moyenne 20%/an à partir de 2015 pour arriver à l’élimination
en 2035. Il s’agit d’un challenge tout à
fait irréaliste même si des efforts particuliers sont déployés.
Des avancées ont
malgré tout été réalisées même si leur impact n’est pas toujours visible à
court terme du fait notamment que la
tuberculose est une maladie dont l’évolution dépend de nombreux déterminants
qu’il est difficile de contrôler (paupérisation, afflux de réfugiés …). Elles se sont situées plus particulièrement
dans 2 domaines:
1. L’amélioration du diagnostic de la tuberculose:
a. Via l’utilisation ciblée de nouveaux
tests de biologie moléculaire plus rapides qui permettent le diagnostic de
tuberculose et de résistance à la rifampicine en 2 heures.
b. En maintenant un niveau d’expertise
suffisant parmi le corps médical (guidelines, formation).
c. En organisant des dépistages ciblés
dans des populations à plus haut risque (contacts, demandeurs d’asile,
prisonniers) pour détecter activement et
plus précocement la maladie. Pour les publics plus marginalisés, en mettant en
place des approches alternatives et concertées
basées sur la sensibilisation des
partenaires afin qu’ils référent en présence de symptômes et de risques
particuliers ( checklist).
2. L’amélioration du traitement de la tuberculose:
a. En informant le corps médical sur les
schémas thérapeutiques evidence-based. Par ailleurs, la création d’un consilium
composé de médecins et laboratoires référents a permis à la Belgique de se doter d’un organe d’avis en matière de prise en charge de la tuberculose
multirésistante. Celui-ci est notamment le garant de la bonne utilisation de
nouveaux médicaments tel que le delamanid –Sirturo ® créé par un laboratoire
belge et mis sur le marché en 2014.
b. En veillant à limiter les abandons de
traitement dont la proportion est non négligeable en Belgique (11 % en 2016) et
est surtout importante en Région de Bruxelles- Capitale (20 % en 2014). Pour se faire 2 initiatives sont à
pointer du doigt: d’une part, un projet financé par l’INAMI et géré par la
Fondation contre la tuberculose (BELTA) qui permet une évaluation systématique
du risque de non compliance chez tout cas de tuberculose nouvellement
diagnostiqué avec pour corollaire une prise en charge holistique et adaptée du
patient par un réseau de partenaires. D’autre part, un projet bruxellois géré
également par BELTA et financé par Action Damien permet la prise en charge
ambulatoire de sans-abri atteints de tuberculose dès leur sortie
d’hospitalisation. Il consiste à donner
des incentives (chèques sociaux, tickets de transport et hébergement en
maison d’accueil) pour améliorer la compliance au traitement.
c. En ouvrant l’accès aux soins pour tout
malade atteint de tuberculose via le projet BELTA-TBnet qui existe depuis 2005.
Ce projet est financé par l’INAMI et est géré par BELTA. Il permet le
financement de manière résiduaire du traitement, d’examens de diagnostic, de suivi et de consultations. Il cible plus
particulièrement les patients multirésistants ou sans couverture sociale ou
incapables de payer le ticket modérateur au cours de la phase ambulatoire du
traitement. Il est considéré comme une bonne pratique par l’OMS.
Une meilleure prise en charge de l’infection tuberculeuse latente
est nécessaire mais reste un challenge.
L’OMS dans ses dernières recommandations de 2015, révisées en
2018, insiste sur le fait de limiter le réservoir de futures tuberculoses en
dépistant les personnes infectées dans certains groupes de population et en les
traitant de manière préventive pour limiter le développement de la
maladie. Se basant sur les évidences, de
nouvelles guidelines sont en voie de finalisation en Belgique; elles sont
destinées aux professionnels de la santé des secteurs curatif et préventif
concernés par la problématique.
Caroline-Cassart.be @ Toute reproduction partielle ou totale est strictement interdite | Propulsé par PSI-WEB