Monsieur le Ministre,

Certains aliments contiennent des nanomatériaux, alors que cela n’est pas indiqué sur l’étiquette.

Pourtant, selon un règlement européen, tout ingrédient contenant des nanomatériaux doit être étiqueté comme tel. Ce qui semble ne pas être le cas, notamment pour certaines marques de blanquette de veau, de chewing-gums et de biscuits.

 

Monsieur le Ministre,

-          Quels sont les dangers liés à la consommation d’aliments contenant des nanomatériaux ?

-          Quels sont les contrôles qui sont menés pour vérifier que les produits contenant des nanomatériaux soient étiquetés comme tels ?

-          Combien de contrôles ont été menés en 2015 ? Quels en sont les résultats ? Quelles sont les sanctions prises à l’égard des marques qui auraient « oublié » d’indiquer la présence de ces nanomatériaux ?

Je vous remercie.


Réponse de Willy Borsus à la question n° 13410 de Caroline Cassart-Mailleux:

Monsieur le président, chers collègues, je tiens tout d'abord à vous remercier pour vos questions certes techniques mais extrêmement importantes.

On le sait, la réglementation européenne actuelle impose que les denrées alimentaires qui ont été fabriquées à partir d'ingrédients contenant des nanoparticules soient spécifiquement étiquetées dans le but d'informer pleinement les consommateurs.

Il faut savoir que les denrées alimentaires constituées de nanoparticules relèvent de la législation européenne relative aux nouveaux aliments. Les additifs, arômes et enzymes relèvent, quant à eux, d'une législation spécifique.

En conséquence, pour pouvoir être utilisés dans les aliments, les nouveaux ingrédients nano doivent faire l'objet d'une autorisation en tant qu'additif ou en tant que nouvel aliment (novel food). Les opérateurs qui souhaitent donc commercialiser une denrée alimentaire contenant des nanoparticules ne peuvent le faire que moyennant l'obtention d'une autorisation spécifique.

Cette procédure d'autorisation au niveau européen nécessite, entre autres, une évaluation des risques liés aux nanoparticules. Jusqu'à présent aucune autorisation n'a été délivrée par la Commission européenne pour un nanomatériau synthétique destiné à être utilisé à titre de denrée alimentaire, d'additif alimentaire ou d'arôme. Par conséquent, l'AFSCA ne contrôle pas l'étiquetage des nanomatériaux présents dans les denrées alimentaires puisqu'il n'y en a pas. L'étude dont vous faites mention fait référence à deux additifs autorisés dans l'alimentation humaine à savoir le dioxyde de titane (TIO2 pour les chimistes) et le dioxyde de silicium (SIO2 pour les biologistes).

Au niveau européen, un programme de réévaluation de tous les additifs présents sur le marché est en cours et s'applique notamment à ces deux additifs spécifiques. Le colorant dioxyde de titane nous intéresse tout particulièrement, étant donné que l'étude évoquée a été menée quant à la présence de cette substance dans un certain nombre de produits dont les biscuits, les gommes à mâcher et la blanquette de veau. Selon la réévaluation récente de cet additif par l'EFSA, l'Agence européenne de sécurité alimentaire, les nanoparticules représentent une part très faible de l'ensemble des particules de l'additif, comme l'a aussi montré l'étude française.

En ce qui concerne les aspects de sécurité, l'EFSA conclut que l'absorption de cet additif est extrêmement faible et qu'elle ne diffère pas suivant qu'il s'agit de microparticules ou de nanoparticules de dioxyde de titane. Cependant il n'existe pas aujourd'hui de méthode de détection validée permettant le dépistage de routines des nanoparticules présentes dans les produits alimentaires. Plusieurs laboratoires européens travaillent et collaborent actuellement pour mettre au point de telles méthodes. La mise à disposition de ces méthodes et l'existence de laboratoires accrédités pour effectuer les analyses sont donc un préalable qu'il me semble devoir activer pour permettre la mise en place d'un programme de contrôle efficient.

Il s'agit donc d'un dossier auquel je souhaite qu'on réserve le plus grand sérieux en fonction du principe de précaution. C'est la raison pour laquelle, indépendamment de ce que je viens de mentionner, le SPF Santé publique a déjà financé divers projets de recherche sur la caractérisation et la méthodologie de l'évaluation des risques liés aux nanomatériaux. Un nouveau projet, désigné par l'acronyme "Nanofood" va débuter prochainement avec comme objectif l'analyse des nanoparticules dans les additifs et les aliments. Lors de la visite en Belgique de Bernhard Url, directeur exécutif de la European Food Safety Authority (EFSA) en juin dernier, le principe d'un projet conjoint avec l'EFSA visant à compléter Nanofood a par ailleurs été conclu.

Enfin, je partage les recommandations de prudence qui ont été évoquées dans cette salle et qui ont été émises par l'OMS. Elles sont d'ailleurs en général appliquées au niveau européen et au niveau belge en particulier, que ce soit en matière de recherche ou au niveau réglementaire. Nous devons donc avoir une vigilance extrêmement soutenue par rapport à l'évaluation et à l'autorisation préalable des nouveaux aliments nano, des nouveaux additifs, des réévaluations des additifs déjà autorisés et de leur présence résiduaire dans l'alimentation.

Caroline Cassart-Mailleux (MR): Merci, monsieur le ministre, pour le caractère complet de votre réponse. Principe de précaution, grand sérieux, je pense que ce sont les termes que vous avez employés pour ce dossier. Nous allons donc pouvoir continuer à travailler sur ce sujet. Nous attendons cette étude avec intérêt.

Je partage votre analyse par rapport à l'OMS. Il faut être prudent dans ce dossier. Nous avons pu constater dans votre réponse que tel est votre souhait.