Madame la Ministre,

Récemment, je vous ai interrogé concernant la collaboration avec les régions sur l'absence de cadre formel pour la délivrance des moyens contraceptifs ou abortifs par les centres de plannings familiaux. A cet égard, vous m'avez indiqué que, bien que les moyens contraceptifs et les pilules du lendemain doivent être plus accessibles pour les femmes, ceux-ci ne peuvent être distribués que par des prestataires de soins ayant suivi une formation pharmacologique adéquate et sur prescription uniquement.

De plus, vous m'avez déclaré étudier le rôle de la sage-femme en la matière. A ce propos, vous aviez demandé différents avis (le Conseil fédéral des sages-femmes, les Académies Royales de Belgique, le Conseil supérieur des médecins spécialistes et généralistes). Je pense que vous avez désormais reçu ces différents avis et eu le temps d'en prendre connaissance.

Pour conclure, vous m'avez indiqué qu'une réunion avec votre homologue wallon, Monsieur Prévot était prévue sur cette problématique.

Madame la Ministre,

§  Quel est l'état d'avancement de ce dossier?

 

§  Avez-vous reçu les différents avis? Que ressort-il de ceux-ci?

 

§  Avez-vous eu des contacts avec les entités fédérées et notamment avec Monsieur Prévot? Si oui, que découle-t-il de ceux-ci?


Réponse à la question parlementaire n° K 1253, q14570 de Caroline Cassart

Concerne: Le suivi du dossier concernant la collaboration avec les régions sur l’absence de cadre formel pour la délivrance des moyens contraceptifs ou abortifs par les centres de planning familial

 

L’Honorable Membre trouvera ci-après la réponse à  sa question.

 

Vous demandez si le cadre légal existant pour la prescription de contraceptifs et de médicaments d’interruption de grossesse devrait être changé.

Courant 2014, mon prédécesseur avait demandé un avis au Conseil Fédéral des Sages-femmes sur l’intégration de cette profession dans les centres de planning familial, entre autres pour l’accompagnement et les conseils en matière de contraception. Le Conseil a remis un avis en novembre 2014 qui stipule que la sage-femme, experte de l'anatomie et de la physiologie de la femme, dispose du bagage théorique nécessaire pour conseiller la femme dans le choix de sa contraception, car elle connait les différents types de contraceptions et peut conseiller de manière appropriée.

La sage-femme est autorisée – si elle correspond aux critères de l’arrêté royal du 15 décembre 2013 relatif aux modalités et les critères de qualification particulière permettant au titulaire du titre professionnel de sage-femme, à prescrire des médicaments – à prescrire la pilule contraceptive aux femmes pendant la  période post-partum.

Le Conseil Fédéral des Sages-Femmes avaitproposé, afin de mettre en adéquation les soins de première ligne, d’élargir les compétences de la sage-femme concernant les prescriptions de médicaments pour ce qui concerne la  recommandation et/ou la prescription des différentes formes de contraceptifs à tout moment.

L’Arrêté royal du 1er SEPTEMBRE 2016, modifiant l’arrêté royal du 15 décembre 2013 fixant la liste des prescriptions médicamenteuses pouvant être rédigées de manière autonome par les sages-femmes dans le cadre du suivi de la grossesse normale, de la pratique des accouchements eutociques et des soins aux nouveau-nés bien portants dans ou en dehors d’un hôpital a été établi en concertation avec les Académies Royales de médecine . Ces académies ont émis un avis négatif , raison pour laquelle le choix a été fait de ne pas élargir la prescription de contraceptifs au-delà de la période post-partum.

J’ai aussi demandé l’avis  du « Conseil Supérieur des médecins-spécialistes et des généralistes ». Le Conseil a émis son avis le 28 avril 2016, en référant à l’avis de l’Académie Royale de Médecine de Belgique et de la Koninklijke Academie voor geneeskunde van België.

 

Je vous transmets deux extraits de cet avis :

-           La prescription de contraceptifs à tout moment (y compris en dehors du contexte limité de trois mois après l'accouchement d'une femme en bonne santé) relève clairement des compétences des médecins.

 

Sans formation médicale, on ne peut pas estimer les interactions entre une pathologie chez la femme (qu'il faut déjà identifier) et le contraceptif.

 

Le contraceptif peut avoir un effet sur la maladie, comme p.ex. sur le lupus ou la sclérose en plaques, et il y a naturellement les effets secondaires plus classiques des administrations de contraceptifs à plus long terme.

 

Les médicaments prescrits pour une certaine pathologie chez la femme peuvent entraîner des interactions sur l'efficacité de la contraception.

 

La reconnaissance et la connaissance d'un grand nombre de pathologies diverses et d'interactions médicamenteuses ne font pas partie du profil de compétences de la sage-femme.

 

-           La prescription et l'utilisation de médicaments d'interruption de grossesse doivent respecter des critères très stricts. L'échographie pour déterminer le stade de la grossesse, le contrôle de la localisation intra-utérine et de l'évacuation après la procédure, le suivi (et la prévention pour les femmes à Rhésus négatif p. ex. ...) supposent une concentration de savoir-faire et de technologie qui requièrent un contexte interdisciplinaire (probablement un milieu hospitalier ou d'une collaboration avec un hôpital) et excluent une compétence autonome de la sage-femme.

 

Par ailleurs, l'article 350 du Code pénal – qui contient les clauses et conditions auxquelles l'avortement n'est pas un délit – stipule clairement que l'interruption de grossesse doit être pratiquée par un médecin.

 

Ces considérations sont à prendre aux sérieux et il faudra trouver des solutions pratiques qui garantissent l’accès aux médicaments et  aux soins de qualité.

Si l’intervention d’un médecin est indiquée, il faudra garantir leur intervention et présence.

 

Un intérêt et une motivation pour cet aspect de la santé publique et  pour le travail au sein des centres de planning familiaux, peuvent s’acquérir  pendant la formation. Et cela se fait déjà: le médecin généraliste est  formé dans un contexte interdisciplinaire et dans différents contextes de soins.

Pour les médecins généralistes déjà agrées, un  frein à la participation dans des centres de planning familial  a récemment été levé.

En effet, l’ancien A.M. du 1 mars 2010 fixant les critères d'agrément    impliquait un risque de perte d’agrément pour les généralistes qui s’orientaient vers ces activités. Le Conseil Supérieur des médecins spécialistes et des généralistes avait souligné dans un avis à ma demande, que ces activités étaient utiles à la société et pour la santé publique et ne pouvaient pas mener à une perte d’agrément d’un généraliste.

Un A.M. du 12 novembre 2015 (M.B., 24 décembre 2015) a modifié cet arrêté ministériel afin de rassurer (entre autres) ces médecins sur le fait que leurs activités ne mettraient plus en danger leur agrément comme médecin généraliste.

 

[1]              Arrêté ministériel du 1 mars 2010 fixant les critères d'agrément des médecins généralistes, MB 4 mars 2010.

 

Les centres de planning familial dépendent de l’autorité des états défédérés, mais je suis à leur disposition pour discuter des aspects évoqués ici à l’occasion de cette question.