Caroline Cassart-Mailleux (MR): Madame la présidente, monsieur le ministre, l'IBR, Infectious Bovine Rhinotracheitis, soit en français Rhinotrachéite Infectieuse Bovine, est une maladie qui se manifeste par des épidémies d'infection des voies respiratoires. Chez les animaux infectés, ce virus est également responsable d'avortement et d'infécondité. En tout état de cause, cette maladie a un impact négatif sur la production animale et la lutte contre l'IBR mise en place est essentielle pour nos éleveurs, d'autant que la Belgique est le second pays européen exportateur de bovins vivants.

Toutefois, je suis interpellée par une situation concrète dans les rapports commerciaux entre deux éleveurs, l'un belge et l'autre français.

Lorsque l'éleveur belge devient propriétaire d'une bête française, quand bien même l'élevage duquel il provient est reconnu indemne d'IBR par les autorités françaises et est considéré équivalent I4 en Belgique, une mise en quarantaine est obligatoire dans l'exploitation française. Cette quarantaine sera suivie d'une seconde mise en quarantaine lors de son arrivée dans l'exploitation belge.

Or, dans un article mis en ligne par l'ASBL ARSIA en 2010 intitulé Le point sur l'IBR -Manuel pratique à l'attention des éleveurs, je lis que la Belgique exporte principalement vers les Pays- Bas et la France, deux pays en situation épidémiologique IBR bien plus favorable que la nôtre, grâce essentiellement à la mise en place d'un plan de lutte.

Cette publication date de 2010 et elle précisait, à l'époque, que nos voisins étaient bien plus avancés que nous en matière de lutte contre l'IBR. Tous les pays de l'Europe du Nord ont mis en place des programmes de lutte contre l'IBR depuis plus de dix ans. Certains sont déjà indemnes (Danemark, Suède, Finlande, etc.). D'autres sont en lutte obligatoire et en phase finale d'éradication (France, Allemagne).

Monsieur le ministre, les constats posés voici près de cinq ans sont-ils toujours d'actualité? J'aurais souhaité vous entendre sur une éventuelle équivalence entre le statut belge en matière de lutte contre l'IBR et ceux de nos pays voisins. Qu'est-ce qui justifie la double mise en quarantaine actuellement exigée lors de l'achat d'une bête sur le territoire français dans une exploitation indemne d'IBR, ce qui équivaut à notre statut I4? Est-il envisagé de coordonner les actions nationales de lutte contre l'IBR afin de faciliter le commerce entre éleveurs de la Grande Région? Avez-vous entrepris des contacts avec vos homologues français et néerlandais dans ce cadre?

J'attire également votre attention sur le fait, qu'en pratique, le bétail acheté en France doit être acheminé individuellement vers la Belgique. Cela a un réel coût de transport complémentaire. Si vous achetez deux bêtes dans des fermes différentes pour l'élevage et que celles-ci doivent être acheminées seules et dans deux camions différents, le coût est important. C'est tout un marché d'achat et de vente de bêtes d'élevage qui risque d'en souffrir. Monsieur le ministre, je souhaiterais dès lors vous entendre par rapport à cela.

Willy Borsus, ministre: Madame la députée, cette question témoigne de votre connaissance approfondie de ce dossier. Vous n'ignorez pas qu'en 2010, seuls quelques pays appliquaient une lutte réglementée contre l'IBR (Rhinotrachéite Infectieuse Bovine). Des programmes volontaires ou locaux étaient en place dans plusieurs pays, parmi lesquels la Belgique, depuis 2006.

En raison des nombreux dommages directs ou indirects que l'IBR occasionne aux exploitations bovines, les éleveurs ont en effet délibérément choisi de combattre l'IBR. Ils y ont investi et investissent encore beaucoup de temps et d'énergie mais aussi de moyens financiers qui permettent d'éviter des pertes importantes liées à cette maladie.

Depuis 2012, la Belgique dispose d'un programme national de lutte, approuvé fin 2014 par la Commission. La Belgique a de ce fait obtenu un statut IBR, appelé article 9, conformément à la décision 2458 de la Commission relative à l'IBR. Ce statut IBR offre à l'État membre qui l'a obtenu des garanties supplémentaires lors de l'importation de bovins afin de protéger son cheptel, et plus particulièrement l'établissement acheteur, contre l'introduction potentielle de cette maladie. Ce statut permet donc aux éleveurs belges d'être mieux protégés, ce qui me semble très important compte tenu notamment des efforts qu'ils ont fournis et des risques potentiellement encourus.

Contrairement à nous, ni la France ni les Pays- Bas ne disposent à ce jour d'un programme de lutte officiel approuvé. Ce n'est qu'en cas d'échanges commerciaux entre des États membres possédant le même statut en matière d'IBR que les échanges peuvent se faire sans restriction. Dans tous les autres cas, des restrictions commerciales sont mises en place par l'Europe afin d'offrir la protection nécessaire à l'État membre indemne de la maladie ou disposant d'un programme validé par les autorités européennes. Les échanges commerciaux depuis des États membres ne disposant pas d'un programme de lutte vers des États membres disposant du statut IBR peuvent être conditionnés à la mise en quarantaine dans le pays d'origine, ce qui n'est pas simple. En Belgique, pour les exploitations de statut I3 et I4, un isolement des bovins achetés est toujours prévu, période durant laquelle les bêtes achetées sont soumises à l'analyse.

À la demande du secteur, la Belgique a pris contact avec les autorités françaises, luxembourgeoises et néerlandaises afin de clarifier ces nouvelles conditions applicables aux échanges commerciaux de bovins vivants qui ne sont pas sans conséquence en matière de commerce et en matière de coût pour les personnes qui interviennent dans la chaîne commerciale.

La directive relative aux échanges intracommunautaires impose aux transporteurs d'animaux de veiller à ce que les animaux transportés ne puissent pas entrer en contact avec des animaux d'un statut sanitaire inférieur. Cette mesure s'applique également à l'IBR, ce que vous avez relevé.

J'ai l'intention, rencontrant très prochainement mon collègue, M. Le Foll, ministre français de l'Agriculture, d'évoquer avec lui la situation de la France, de manière à voir comment il m'est éventuellement possible de concilier le strict respect de la directive européenne, la préservation de notre statut contre tous les risques et un pragmatisme économique. Ce n'est pas simple, mais je pense que des espaces de travail sont exploitables.

Caroline Cassart-Mailleux (MR): Je remercie le ministre pour le caractère tout à fait complet de sa réponse. Des avancées ont déjà eu lieu et il faut continuer dans cette direction. Je reviendrai par le biais d'une question écrite dans un mois pour voir si vous avez eu des contacts avec votre homologue, le ministre français. Nous souhaitons réellement des avancées.

Si les statuts sont similaires voire meilleurs en France que chez nous, il est souhaitable qu'il y ait une des deux périodes de quarantaine, mais pas les deux. Cela pourrait être une proposition plus souple. Le transport pourrait avoir lieu s'il y a dans le camion du bétail qui n'ait pas un statut inférieur. Il faut toujours essayer de trouver l'excellence.

Certaines pistes peuvent être trouvées en respectant la directive européenne. Sur le terrain, il faut essayer de trouver des solutions pragmatiques, en accord avec cette lutte contre l'IBR qui est importante, pour que ces échanges commerciaux puissent persister. Vous savez comme moi qu'actuellement, outre la race blanc- bleu-belge (BBB) qui est prédominante, il y a une diversification avec certaines races françaises et parfois même un croisement entre BBB et races françaises. Ces échanges commerciaux sont importants pour toute une économie et tout un secteur.